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Transformer l’impôt sur le revenu en impôt négatif

Transformer l’impôt sur le revenu en impôt négatif

Dans un article publié dans Sociétal, la revue de l’Institut de l’Entreprise, notre expert Marc de Basquiat dénonce un système français des minima sociaux trop complexe et désincitatif au retour à l’emploi. Il plaide pour l’instauration d’un impôt négatif : le revenu universel. 

 

Marc souhaite avant tout garantir un revenu de subsistance à chaque citoyen français. Actuellement, dix minima sociaux permettent à 4,5 millions de bénéficiaires, et 2,6 millions de personnes à charge, de vivre. Il revient sur l’histoire de l’impôt négatif en France et dans le monde et par ailleurs sur la proposition de Benoît Hamon lors la présidentielle de 2017 de mettre en place un revenu universel ou encore sur la création du Revenu universel d’activité par Emmanuel Macron, projet qui visait à fusionner le RSA, la prime d’activité et les aides au logement. 

 

« Un ensemble assurant tant mal que bien la survie de presque 10 % de la population de notre pays mérite plus de courage politique que l’emploi d’un terme caricatural : l’assistanat. »

Marc l’affirme : notre système socio-fiscal actuel désincite au travail. Il revient sur les multiples allocations existantes allouées aux individus les plus fragiles (ADA, RSO, AAH, ASPA, ASS…), lorsque ces derniers n’arrivent pas se suffire des gains provenant de leur activité professionnelle. Dans certains cas, en travaillant davantage, les allocataires n’ont aucun gain supplémentaire. Marc se penche particulièrement sur les modalités d’octroi du RSA (dernière prestation dans la hiérarchie sociale française) qui est calculé sur la base du montant maximum théorique auquel on soustrait toutes les ressources financières obtenues par l’allocataire. Le système, bien trop complexe, induit de nombreuses erreurs. Pour un bénéficiaire du RSA, il apparaît clairement que le retour à l’emploi n’est pas la solution la plus pertinente, au vu de la perte financière engendrée et des avantages complémentaires diminués. 

 

« Cette soustraction des revenus d’activité est le propre de toutes les allocations « différentielles » qui garantissent un certain niveau de ressource total en supprimant toute motivation financière à une activité modeste. »

Pour Marc, cet effet négatif des minima sociaux sur l’offre de travail n’est pas nouveau. Il s’agit d’une problématique connue depuis la fin du XVIIIe siècle et soulevée notamment par Malthus ou Marx. Marc dénonce les effet revenu et de substitution qui interfèrent sur le point d’équilibre entre offre et demande et biaisent le marché du travail. Lorsqu’un individu estime percevoir des revenus suffisants pour vivre, il ne retournera à l’emploi que pour des fins autres qu’économiques : il s’agit là de l’effet revenu. L’effet de substitution, lui, concerne les individus qui travaillent peu et qui décident de travailler plus, si et seulement si le gain additionnel est assez significatif. 

La critique actuelle des minima sociaux se focalise principalement sur leurs montants. Certains estiment que la combinaison de toutes les aides sociales octroyées à un allocataire se rapproche du montant du SMIC et donc que le différentiel de revenus entre un allocataire et un travailleur est trop faible. Cependant, la majorité des minima sociaux sont des prestations différentielles qui interviennent sur les revenus du ménage entier, pas seulement de l’allocataire. Ainsi, Marc souhaite aller plus loin et agir sur « le taux marginal de prélèvement implicite », qui décourage l’inclusion par le travail des allocataires. 

 

« Lorsqu’il s’agit d’encourager les bénéficiaires de l’aide sociale à chercher un travail, on est face à deux options : baisser le niveau de l’aide pour agir sur l’effet revenu (motiver par la faim) ; ne soustraire qu’une partie des revenus d’activité (motiver par le gain). »

Pour mettre fin à cette complexité et ces désincitations, notre expert propose une solution efficace, bien que radicale : la revenu universel, dont il est l’un des fervents défenseurs. La notion d’impôt négatif a vu le jour dès 1838 en France, sous la plume de Cournot qui a imaginé que le calcul des impôts pourrait aboutir à un reversement de l’État aux contribuables. Cette proposition s’est exportée ensuite en Angleterre et aux États-Unis et a été reprise par de nombreux économistes. Ces débats ont, par exemple, donné lieu au « earned income tax credit » (EITC en 1975 aux États-Unis) ou d’autres expérimentations. Les conclusions finales en sont plus que positives et ont démontré l’impact de cette solution fiscale sur le taux marginal de prélèvement implicite.

En 1974, l’économiste et secrétaire d’État Stoléru ramène cette idée dans le débat mais cela n’a, in fine, abouti qu’à l’augmentation par Valéry Giscard d’Estaing du minimum vieillesse, par crainte d’être accusé d’inciter à la fainéantise. Par la suite, François Mitterrand s’inspire de Stoléru et met en place le « revenu minimum d’insertion » (RMI), malheureusement encore une prestation différentielle avec un taux de prélèvement marginal de 100%. Le nombre de bénéficiaires du RMI en hausse constante, Lionel Jospin instaure la première version d’impôt négatif en France (PPE : Prime pour l’emploi) mais sans effet incitatif et trop complexe.

 

« Serait-il possible de concevoir un dispositif plus satisfaisant, protégeant efficacement les personnes sans les décourager de travailler ? »

Marc souligne l’avancée majeure que représente le prélèvement à la source mis en place en 2018. « Le fisc est donc capable de calculer chaque mois un impôt négatif en fonction des revenus du mois écoulé ». De plus, l’impôt sur le revenu a fortement augmenté ces dernières années (pourtant acquitté par seulement 44% des ménages).

Concrètement, Marc appelle à transformer le calcul mensuel de l’impôt sur le revenu actuel en un impôt négatif, un revenu universel inconditionnel et généralisé. Cet impôt négatif serait ajouté dans le calcul de la base ressources. Ainsi, les prestations sociales seraient finalement nulles si leur montant actuel est inférieur à l’impôt négatif. Les dispositifs actuels obsolètes disparaîtraient au fur et à mesure, le taux de prélèvement marginal sur les revenus d’activité, à hauteur de 30% serait plus raisonnable. La mise en place de ce nouveau et ambitieux dispositif socio-fiscal ne pose, selon Marc, aucune difficulté technique, au contraire elle assurerait « la robustesse d’un socle de revenu pour tous ». La seule opposition apparaît sur le plan politique et philosophique, qu’il est urgent de dépasser. 

 

« C’est plutôt l’agilité de nos esprits habitués à ranger les personnes dans diverses catégories concernées par autant d’outils de plus en plus compliqués qui est en jeu. Peut-être que la question la plus fondamentale est celle-ci : à qui profite la complexité croissante de nos systèmes socio-fiscaux ? »

 


Pour lire l’article de Marc, cliquer ICI.

Pour consulter notre rapport « Liber : un revenu de liberté pour tous », cliquer ICI.

 

Publié le 27/06/2023.

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