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Fusions communales : une méthode anachronique et autoritaire

Fusions communales : une méthode anachronique et autoritaire

Alors que la plupart des pays européens décentralisent, la France retire de l’autonomie aux territoires locaux. Dans Contrepoints, notre expert Raul Magni-Berton revient sur l’utilisation française d’un outil anachronique, au service de la centralisation : la fusion communale. 

 

Pour Raul, la situation de l’autonomie des territoires locaux, au sein du cadre nationale, est comparable à celle des territoires nationaux réclamant leur indépendance. Il prend exemple sur la ville ukrainienne de Lviv, dont nous trouvons aujourd’hui qu’elle ait changé quatre fois d’appartenance nationale en un siècle, passant successivement d’autrichienne à polonaise, de russe à ukrainienne, au gré des conquêtes et des traités internationaux.

Aujourd’hui, « nous estimons que les territoires et leurs habitants ne sont pas des choses à échanger ou à conquérir. Ils ont des droits, et notamment celui d’avoir leur mot à dire sur leur place au sein d’un système et d’une culture nationale […]. Pour autant, ce bon sens peine à s’appliquer au niveau infranational, particulièrement en France. »

« [Les territoires] n’ont pas le droit de sauvegarder leurs frontières, de lever l’impôt, d’exercer les compétences qu’ils estiment utiles à leur développement, de choisir leurs propres règles de décision parce que, comme chacun le sait, en France, c’est l’État et seulement l’État qui dispose de telles compétences. »

 

Ainsi, au sein du cadre national, c’est à l’État de décider pour les échelons locaux, comme en témoignent la réforme des régions redessinées par le pouvoir central ou les intercommunalités qui ont été souvent des « mariages forcés entre communes réticentes ». Et même si elles sont impopulaires, ces pratiques restent tolérées en France. Les régions « n’ont pas le droit de sauvegarder leurs frontières, de lever l’impôt, d’exercer les compétences qu’ils estiment utiles à leur développement, de choisir leurs propres règles de décision parce que, comme chacun le sait, en France, c’est l’État et seulement l’État qui dispose de telles compétences ».

« En Europe, les pays tendent à se décentraliser, et l’Union européenne elle-même prône le principe de subsidiarité qui permet aux territoires d’avoir davantage de droits, en prenant des décisions dans les domaines où il est plus efficace que ce soit eux qui les prennent. »

 

Pourtant, aux yeux de Roul, « la centralisation française est de plus en plus anachronique » à l’heure où la plupart des pays européens tendent à se décentraliser et où l’Union européenne elle-même souhaite accorder davantage de pouvoir aux territoires, guidée par le principe dit de « subsidiarité », qui considère qu’une autorité centrale ne peut effectuer que les tâches qui ne peuvent pas être réalisées à l’échelon inférieur.

Alors que les études montrent qu’un tel principe permet une plus grande efficacité et transparence et à l’heure où les citoyens et élus locaux demandent davantage d’autonomie, la France a certes mis en place des lois de décentralisation, mais qui « produisent paradoxalement de moins en moins d’autonomie des territoires ».

« Les études scientifiques soulignent (…) que dans les pays développés, l’autonomie des territoires est source d’efficience et de transparence. Elle a même des vertus en situation d’urgence, comme nous avons pu le voir pendant la pandémie de la covid. Enfin, les citoyens et les élus locaux – qui sont les représentants les plus populaires de France – ne cessent de demander plus d’autonomie. »

 

Il en va ainsi par exemple des lois de 2010, 2015 et 2019 sur les collectivités territoriales qui permettaient aux communes de fusionner librement et sans contrainte en créant une commune nouvelle. En effet, cette « liberté » apparente de fusionner s’est accompagnée de coupes budgétaires, rendant les communes davantage dépendantes aux subventions de l’État, qui ne s’appliquaient pas aux communes acceptant de fusionner. Par ailleurs, le préfet avait également la possibilité d’imposer la fusion entre plusieurs communes, mais sans les bénéfices liés à un fusionnement volontaire. « Dans ces conditions, les fusions consensuelles ressemblent plutôt à des mariages forcés », résume Raul.

Face à cette situation, il préconise des fusions choisies, fondées sur le principe de subsidiarité ascendante et motivées par des raisons aussi bien économiques (« les communes qui n’arriveront pas à se gérer efficacement seront tentées de s’annexer à celles qui, au contraire, auront fait les bons choix ») que culturelles.


Pour lire l’article de Raul, cliquer ICI.

Pour lire notre rapport « Le pouvoir aux communes », cliquer ICI.

Pour lire notre rapport « Fiscalité locale : Oser “Pacte girondin” », cliquer ICI.

 

Publié le 03/07/2023.

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