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Déconfinement : les libertés attendent toujours

Déconfinement : les libertés attendent toujours

La sortie du confinement est un exercice délicat et l’exécutif marche sur des œufs. On peut le comprendre. Il n’en reste pas moins que l’état des restrictions aux droits et libertés en France reste préoccupant, alors même que les autorités sanitaires affichent un certain optimisme. Le déconfinement des libertés n’est pas un luxe.

 

Depuis plusieurs semaines, grâce à l’amélioration de la situation sanitaire, les Français retrouvent le goût de la liberté. Certaines des restrictions les plus symboliques ont été levées. Nous pouvons de nouveau nous déplacer librement, prendre un verre en terrasse ou retrouver nos magasins favoris.

Il faut à tout prix lutter contre la normalisation de mesures qui dérogent profondément au droit commun.

Mais ce constat est malheureusement l’arbre qui cache la forêt, tant nombre des mesures restrictives prises pour lutter contre l’épidémie de covid-19 restent encore en vigueur. Pire, le Gouvernement semble s’orienter vers une solution hybride, une sortie formelle de l’état d’urgence sanitaire dont la plupart des dispositions resteraient néanmoins encore en vigueur pour quatre mois, laissant à l’exécutif des pouvoirs exceptionnels pour faire face à une recrudescence de l’épidémie. Cette fausse sortie de l’état d’exception n’est pas satisfaisante. Si l’état d’urgence est encore nécessaire, ce qu’il appartient à l’Etat de démontrer, alors mieux vaut qu’il soit clairement activé. S’il ne l’est plus, quel est le besoin de laisser au Gouvernement ses pouvoirs exorbitants ? L’état d’urgence pourrait toujours être réactivé si besoin. Il faut à tout prix lutter contre la normalisation de mesures qui dérogent profondément au droit commun.

L’attention s’était cristallisée ces derniers jours sur l’interdiction des rassemblements de plus de dix personnes sur la voie publique, qui portait atteinte au droit fondamental de se réunir et de manifester. Dans une décision salutaire, le Conseil d’Etat a jugé samedi 13 juin qu’une telle mesure n’était pas justifiée par la situation sanitaire actuelle, sauf dans les cas où les mesures barrières ne pouvaient être respectées.

Dans une décision salutaire, le Conseil d’Etat a jugé samedi 13 juin que l’interdiction des rassemblements n’était pas justifiée par la situation sanitaire actuelle, sauf dans les cas où les mesures barrières ne pouvaient être respectées.

On pouvait légitimement se demander pourquoi une mesure aussi stricte était encore en vigueur à l’heure où, aux dires même du Gouvernement, tous les voyants sont aux verts. Elle semblait incohérente avec l’ouverture des parcs, jardins, plages, terrasses, où ce sont largement plus de dix personnes qui se réunissent simultanément, sans obligation de porter un masque et avec un respect des gestes barrières assez relatif. Le caractère assez intenable de cette mesure poussait d’ailleurs le Gouvernement à en faire une application discrétionnaire, selon le degré d’« émotion » suscité par telle ou telle manifestation. C’était là la pire des situations, puisqu’elle aboutissait à tolérer des rassemblements massifs incontrôlés et risqués sanitairement parlant.

Il ne faut pas oublier non plus que le fonctionnement du système judiciaire garde encore un caractère largement dérogatoire : audiences dématérialisées, prorogations de diverses mesures sans le contrôle du juge ou sans l’accord des parties, prorogations de délais variés, etc. Là encore, on peine à comprendre, compte tenu de l’état actuel de l’épidémie, pourquoi la justice ne pourrait pas reprendre son fonctionnement normal avec des mesures de protection appropriées.

On peine à comprendre pourquoi la justice ne pourrait pas reprendre son fonctionnement normal avec des mesures de protection appropriées.

La sortie du confinement est un exercice délicat et l’exécutif marche sur des œufs. On peut le comprendre. Il n’en reste pas moins que l’état des restrictions aux droits et libertés en France reste préoccupant, alors même que les autorités sanitaires affichent un certain optimisme. Le déconfinement des libertés n’est pas un luxe.


Pour consulter l’Observatoire des Libertés Confinées, cliquer ICI.

Pour lire l’entretien « Dès qu’il s’agit d’un but vertueux, les libertés passent à la trappe » avec Vincent Delhomme dans Le Point, cliquer ICI.

Pour lire l’article « Ces nombreuses libertés (toujours) restreintes en France par l’état d’urgence sanitaire » dans Le Monde, qui s’appuie sur notre Observatoire des Libertés Confinées, cliquer ICI.

 

Publié le 14/06/2020.
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