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De Hayek à Gamel : la recherche d’une « utopie libérale »

De Hayek à Gamel : la recherche d’une « utopie libérale »

Dans une nouvelle série de France Culture consacrée à Hayek, Claude Gamel, auteur d’Esquisse d’un libéralisme soutenable dans la collection GL aux PUF, revient en compagnie de l’historien des idées Philippe Nemo sur la matrice libérale de l’autrichien nobélisé en 1974. 

 

Pour Claude Gamel, la puissance conceptuelle de l’oeuvre de l’économiste autrichien est telle qu’il voit en lui l’homologue libéral de Marx. À l’instar du matérialisme historique marxiste –  inspiré de la dialectique hégélienne -, Hayek est le fondateur d’une « dialectique libérale ». Dans la pensée hayekienne, deux objets sociaux se font face. D’un côté, un ordre social spontané – à savoir la société dans son ensemble – tellement complexe qu’il échappe à toute capacité d’ordonnancement compte tenu des nombreuses et diverses interactions sociales impossibles à piloter. De l’autre côté, des organisations elles-mêmes complexes mais d’une complexité moindre puisque capables de se doter de moyens – humains, matériels, financiers – afin de réaliser des objectifs autonomes et préalablement définis.

Les organisations, parmi lesquelles l’État, les entreprises ou les organisations non-marchandes, peuvent « piloter » leurs affaires mais ne peuvent diriger l’ensemble de la société au risque de tomber dans un écueil totalitaire. Pour l’ordonnancement de la société dans son ensemble, Hayek s’en remet à la mise en place des règles juridiques héritées de la coutume et de la tradition, qu’il nomme règle de « juste conduite », dictées par le juge et présentes dans le Droit.

« Il n’y a rien dans les principes du libéralisme qui permette d’en faire un dogme immuable ; il n’y a pas de règles stables, fixées une fois pour toutes. Il y a un principe fondamental : à savoir que dans la conduite de nos affaires nous devons faire le plus grand usage possible des forces sociales spontanées, et recourir le moins possible à la coercition. » Friedrich Hayek. 

Comme le précise Claude Gamel, Friedrich Hayek rejette l’expression de « justice sociale ». Pour l’économiste et philosophe autrichien, l’ordre social spontané induit de facto l’impossibilité de maîtriser la société donc de l’organiser de façon juste. Néanmoins, cela ne signifie pas que l’idée de justice soit absente de sa pensée. Bien au contraire, elle trouve chez Hayek son fondement dans le respect des règles abstraites de juste conduite. Ces règles négatives, qui ne disent que ce qui est proscrit, ne diront jamais comment faire pour réussir.

Hayek perçoit le marché comme un jeu qui ne peut être méritocratique et ne peut rétribuer les individus justement. Les prix et les salaires n’ont ainsi pas vocation à récompenser l’individu mais à lui indiquer où positionner ses ressources dans son intérêt comme « dans l’intérêt général ». Philippe Nemo ajoute que dans la raison hayekienne, l’égalité des chances est un leurre au regard de la dynamique du marché, c’est au contraire lui – le marché – qui offre le plus de chances aux individus. En ce sens, Philippe Nemo conclut son propos en affirmant, dans le giron hayekien, que la société libérale doit être considérée comme la plus égale puisqu’il y règne une stricte égalité devant la loi.

« Il y a toute les différences du monde entre traiter les gens de manière égale et tenter de les rendre égaux. La première est une condition pour une société libre alors que la seconde n’est qu’une nouvelle forme de servitude. » Friedrich Hayek 

Toutefois, il ne faut pas s’imaginer Hayek comme un être hors-sol, déconnecté de toute considération sociale. Il conçoit l’idée d’un revenu minimum devant permettre à l’individu d’assurer sa subsistance, à condition qu’il soit inférieur au plus bas salaire versé sur le marché. À la question de son financement, Claude Gamel rappelle en vertu de la dialectique libérale que l’État en tant qu’organisation – chargée de fournir des biens collectifs comme la défense et la justice – doit pouvoir engranger des recettes ipso facto prélever des impôt. Dès lors, il n’y a pas d’incompatibilité pour le fondateur de la société du Mont-Pèlerin à ce que l’État puisse recourir à l’impôt pour financer ce filet de sécurité minimum.

« Hayek déplorait l’absence d’une « utopie libérale ». Claude Gamel nous en fournit une, avec l’emballage et le mode d’emploi. A vous lecteurs, de vous en emparer et d’en faire une réalité. » Gaspard Koenig

Dans notre troisième ouvrage aux PUF, Claude Gamel confronte les thèses de Hayek et de Rawls pour nous livrer les trois axes prioritaires d’une régulation moderne : travail choisi, capacités enrichies, revenu universel de base.


Pour écouter le podcast sur France Culture, cliquer ICI.

Pour découvrir notre ouvrage aux PUF « Esquisse d’un libéralisme soutenable », cliquer ICI.

 

Publié le 08/05/2022.

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