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Compte-rendu : Reinventing Liberalism

Compte-rendu : Reinventing Liberalism

Mercredi 24 octobre, notre think-tank a organisé une conférence à l’ENS pour penser la réinvention du libéralisme. Découvrez ici le compte-rendu de cet événement modéré par Kenneth Cukier de The Economist. A Glen Weyl qui propose d’abolir le monopole de la propriété privée pour y substituer un système de marché radical, Gaspard Koenig propose d’étendre la notion de propriété jusqu’aux horizons de la « propriété de soi ».

 

Vidéo de la conférence 

Meeting minutes (EN) : Marketopia or Self ownership

On assiste aujourd’hui à une crise économique et politique de l’ordre dit néolibéral. Les inégalités augmentent, la croissance de la productivité diminue, les monopoles se renforcent. La montée de l’extrémisme politique pointe de nombreuses failles dans nos démocraties.

Dans ce contexte, Glen Weyl imagine ce que serait Marchutopie, la société idéale. À Marchutopie, il n’y a plus de notion de propriété privée. Tout est constamment mis aux enchères, à un prix compétitif. Lorsque l’on possède un bien, on doit auto-évaluer sa valeur, et payer en une taxe pour son usage. Weyl appelle cela la « taxe auto-évaluée de propriété commune ». Surtout, on doit être prêt à céder son bien si un enchérisseur est prêt à payer plus pour le posséder.

À Marchutopie, il n’y a plus de notion de propriété privée. Tout est constamment mis aux enchères, à un prix compétitif.

On pourrait croire que ce mécanisme, au lieu de redistribuer la richesse, permettrait au contraire aux plus favorisés de l’accumuler. Cependant, il est nécessaire ici de s’interroger, qu’est-ce qui constitue la richesse des « riches » ? C’est posséder des terrains, des entreprises, de l’immobilier. Or, cela sera impossible à Marchutopie. Ainsi, les biens seront répartis de manière efficace, à travers des prises de décisions collectives. Le profit des enchères sera de plus reversé à la société, soit sous la forme d’un dividende social, semblable à un revenu universel, soit sous la forme de provision de biens communs.

Si cette société paraît idéale, Gaspard Koenig lui oppose de nombreuses critiques. Tout d’abord, l’homme ne bénéficierait pas forcément de l’abolition de la propriété privée. Posséder est important pour l’homme, car cela lui donne une certaine individualité. L’image des hommes se construit à travers leurs propriétés, ce qui leur permet de se projeter dans le futur. Quand je possède une maison, je peux imaginer ce que sera ma vie future dans cette maison. Ainsi, comme l’a montré de nombreux philosophes comme Locke, la propriété privée est part de l’identité humaine. De plus, posséder un bien sur le long terme permet aux propriétaires d’être plus libre dans leur usage de l’objet. Ils n’ont pas besoin d’en maximiser l’efficacité, ils peuvent choisir une utilisation sous-optimale s’ils le préfèrent.

Posséder est important pour l’homme, car cela lui donne une certaine individualité

Ainsi, Gaspard Koenig craint, dans la théorie de Glen Weyl, un déni de l’individualisme au profit du collectivisme, à l’image de la société chinoise. S’il soutient la thèse de séparer des marchés la notion de propriété privée, il dénonce les moyens défendus par Weyl pour le faire. Pourquoi,  à la place d’interdire la propriété privée, ne donnerions-nous pas plutôt des biens à tout le monde ? Dans ce scénario, ce ne serait plus le capital que l’on taxerait, mais la consommation, car en possédant un bien on prive la société de son usage.

Finalement, les désaccords entre Gaspard Koenig et Glen Weyl reflètent une profonde opposition idéologique : l’idée de propriété privée radicale versus l’idée de marchés radicaux. Pour le premier, l’essentiel du libéralisme est la suprématie de l’individu. Pour le second, c’est un champ ouvert de possibilité, dynamique et fluide, en opposition à des autorités arbitraires et hiérarchiques.

 

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