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RIC, proportionnelle : quelle démocratie sous Marine Le Pen ?

RIC, proportionnelle : quelle démocratie sous Marine Le Pen ?

Dans Le Point, notre expert Raul Magni-Berton décrypte les propositions de Marine Le Pen en faveur de la démocratie. S’il en plébiscite les dispositifs, le professeur en science politique en conteste les modalités d’application.

 

À quelques jours du second tour, la candidate du Rassemblement National mène le tempo sur les réformes institutionnelles en posant les questions de nos modes de scrutin et de notre rapport à la démocratie. Elle esquisse les contours d’une démocratie revivifiée en proposant l’instauration d’un référendum d’initiative citoyenne et l’introduction du scrutin à la proportionnelle pour les élections législatives. Si ces propositions ont le mérite de séduire sur la forme, le diable se cache dans les détails.

« Les solutions présentées par Marine Le Pen sont à première vue raisonnables. Le référendum d’initiative citoyenne se développe partout dans le monde, sous des formes diverses et il est soutenu par des larges majorités au sein des populations en France, en Europe et ailleurs. De même, un mode de scrutin plus proportionnel permet aux perdants des élections d’être tout de même représenté de façon à peser dans les élections. Cela réduit l’insatisfaction à l’égard de la démocratie et la radicalisation dans nos sociétés. »

À l’aune des cas existants dans d’autres États comme la Suisse, l’Uruguay et la Californie, Raul dissèque la proposition de Marine Le Pen sur le référendum d’initiative citoyenne (RIC). Dans les pays susmentionnés, les initiatives citoyennes permettent aux citoyens d’agir directement sur la fabrique de la loi en participant à sa promulgation par voie référendaire. Le dispositif est tel que les citoyens peuvent impulser des initiatives contenant des révisions constitutionnelles. De fait, ils ont un contrôle effectif sur les parlementaires. Néanmoins, le RIC façon Marine Le Pen est plus à chercher du côté de la Hongrie et de l’Italie où son efficacité est sujet à caution. Les initiatives sont bornées à des thématiques précises et soumises à des « quorums exigeants ». Comme l’explicite Raul, la candidate RN prévoit des gardes fous au plein exercice du RIC comme l’instauration d’un seuil de signatures minimales, la possibilité pour le Président ou les parlementaires de bloquer des initiatives jugées trop « extrêmes ». L’expert en science politique s’interroge sur l’intérêt réel d’un RIC susceptible d’être muselé par le pouvoir politique en place alors même que sa conception originelle vise à le dépasser.

« Jusqu’ici, le diagnostic et les deux principales pistes de solution correspondent à ce qui est largement observé dans la littérature en science politique. Malheureusement, les détails des propositions faites par Marine Le Pen vont, en revanche, à l’encontre de la philosophie qu’elle a si bien dessinée. »

Concernant l’introduction du système proportionnel en France, notre expert rappelle que 7 Français sur 10 sont favorables à sa mise en place. À nouveau, les exemples d’application ne manquent pas et se déclinent différemment selon les cultures politiques nationales. Au Pays-Bas, chaque parti obtient un nombre de sièges proportionnel à son score. En Grèce ou en Arménie, le système est tout autre : 2/3 de proportionnel et une prime majoritaire pour le parti arrivé en tête. Là encore, c’est cette option discutable que Marine Le Pen privilégie aujourd’hui. De façon antinomique et comme l’assène Raul, « un système proportionnel avec une prime majoritaire n’est donc pas un système proportionnel ». Ce système aurait pour effet d’avantager le Rassemblement National capable de sortir en tête aux élections lui permettant d’obtenir une majorité dans l’hémicycle par la prime majoritaire. Exit le compromis démocratique et partisan permis par une proportionnelle intégrale.

Pour Raul, si les diagnostics posés par Marine Le Pen sont les bons, l’agencement des solutions proposées navigue à contre-courant de leurs ambitions initiales. En conséquence et comme nous le revendiquons, il est grand temps de déprésidentialiser la France et d’instaurer la culture du compromis dans nos institutions.


Pour lire l’article du Point, cliquer ICI.

 

Publié le 15/04/2022.

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