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Quel libéralisme soutenable au XXIe siècle ? – Gaspard Koenig

Quel libéralisme soutenable au XXIe siècle ? – Gaspard Koenig

Interrogé par RTBF, Le Figaro et Radio Classique, Gaspard Koenig, analyse les défis contemporains du libéralisme. Face au pragmatisme utilitariste et à la planification écologique, il plaide pour un libéralisme radical confiant dans l’ordre spontané. 

 

Dans l’entretien accordé à la première chaîne de télévision belge, Gaspard revient sur les crises que nous vivons actuellement : la récente pandémie et les bouleversements écologiques. Selon lui, ces crises testent nos démocraties libérales. Malgré des réponses étatiques centralisées, Gaspard estime qu’elles se sont globalement solidifiées dans l’épreuve. Dans les régimes autoritaires où l’information est cadenassée, les exécutifs ont au contraire pâti de ces crises. En Russie, la crainte de la hiérarchie a conduit toute la chaîne de commandement militaire à occulter aux sommets de l’État, la réalité de l’armée. Résultat : la Russie s’embourbe dans un conflit qui devait être une promenade de santé. De son côté la Chine qui a masqué le début de la pandémie se retrouve engluée dans sa stratégie autoritaire du zéro covid et peine à s’en sortir.

Il faut donc en conclure que libéralisme est mieux armé pour se prémunir des crises. Néanmoins pour qu’il perdure, il est nécessaire qu’il sache se renouveler au gré des époques. À l’instar du colloque Lippmann des années 1930, durant lequel la doctrine libérale avait été fortement remodelée et s’était imposée dans les grandes institutions internationales, le libéralisme se doit d’être à l’avant-garde des défis à venir. En ce sens, Gaspard rappelle le travail accompli par GenerationLibre via la publication de rapports aux propositions novatrices sur le revenu universel et la propriété privée des données personnelles.

“La simplification n’était pas le thème unique mais le point d’entrée qui me permettait de décliner les propositions sur lesquelles je travaille depuis longtemps comme le revenu universel, la propriété des données, l’autonomie locale, le droit du vivant, etc.”

Quant à savoir si les difficultés ressenties pendant la crise covid l’ont amené à s’interroger sur le libéralisme – en raison des ruptures dans les chaînes d’approvisionnement et de l’interventionnisme économique de l’État -, Gaspard répond qu’il s’est davantage questionné sur les fondements théoriques justifiant les décisions étatiques. Il regrette l’opposition santé vs économie qui a orienté toute la politique gouvernementale. Selon lui, il aurait été plus judicieux de se baser sur un modèle de risque « années de vies gagnées / années vies de perdues » comme l’a fait GenerationLibre à l’aide d’une une méthodologie permettant de mesurer les conséquences positives et négatives des confinements sur l’espérance de vie des Français : d’un côté, les années de vie gagnées grâce aux mesures restrictives, de l’autre les années de vie perdues par les déclassements économiques.

Conscient des limites actuelles que rencontre le néolibéralisme – la maximisation outrancière des flux et des profits – désormais décrié par un fort mouvement sociétal qui pousse à en sortir, Gaspard reconnaît la nécessité d’un aggiornamento que les libéraux doivent accompagner. Sur l’enjeu climatique, il affirme que la question n’est de pas savoir si l’État doit ou ne doit pas intervenir lorsque l’humanité est menacée mais comment il le doit. L’État peut décréter la mise en place de contraintes tout en laissant le soin aux individus d’être libres de s’organiser en conséquence. Le modèle incitatif d’une taxe carbone redistribuée aux individus en est la parfaite illustration. À contrario de la planification écologique, le marché constitue la promesse de l’innovation capable d’apporter son lot de solutions à des problématiques qu’on ne peut pas anticiper. En matière d’écologie, l’ordre spontané d’Hayek doit l’emporter sur les projections planificatrices incertaines d’experts endogames.

“La véritable mission de la politique est de construire un idéal pour les citoyens. On peut et on doit porter des propositions radicales, y compris au sein d’un espace raisonnable comme celui du centre. La raison n’est pas condamnée à être pusillanime !”

Néanmoins, les bouleversements environnementaux obligent Gaspard à s’interroger sur la notion de liberté. Doit-elle se comprendre comme étant simplement la multiplication des possibles, faire ce dont on a envie quand on le désire, ou doit-elle au contraire, s’envisager comme un contrôle de soi entraînant une indépendance vis-à-vis des contraintes extérieures. C’est cette deuxième option stoïcienne qu’il privilégie.

Pour faire face aux défis à venir, le libéralisme doit s’armer de radicalité. Telle que l’entend Gaspard, la radicalité n’est pas l’apanage des révolutionnaires mais consiste en une doctrine capable de dispenser une vision du monde qui nous sorte de la  gouvernance pragmatique à l’oeuvre. Présenté comme une forme apolitique de l’exercice du pouvoir, le pragmatisme n’est en réalité qu’un utilitarisme – hérité de la philosophie bien politique de Bentham et de Saint-Simon – qui ne dit pas son nom. Il faut donc renouer avec les préceptes de la philosophie tocquevilienne qui, pour Gaspard, “placent toujours l’exercice du jugement personnel, du libre-arbitre, de la délibération collective, au-dessus de la bonne gestion qui finit par dévitaliser toutes les passions humaines”.


Pour visionner l’entretien de Gaspard à la RTBF, cliquer ICI.

Pour lire l’entretien de Gaspard dans Le Figaro, cliquer ICI.

Pour écouter l’entretien de Gaspard chez Radio Classique, cliquer ICI.

 

Publié le 30/05/2022.

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