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[Lu Ailleurs] Plaidoyer pour une laïcité libérale

[Lu Ailleurs] Plaidoyer pour une laïcité libérale

Jean Baubérot, historien de la laïcité, interpelle Emmanuel Macron, en novembre 2020, dans une lettre ouverte sur le projet de loi dit « séparatisme ». Nous revenons sur ce texte subtil en faveur d’une laïcité libérale.

 

Jean Baubérot exhorte Emmanuel Macron à ne pas suivre l’agenda dicté par une partie de la droite de l’échiquier politique. Il argue qu’il y a une confusion entre communautarisme et séparatisme, qui doit être évitée dans la mesure où le premier ne constitue pas de menace pour la République mais qui, s’il est attaqué abruptement, peut mener au second.

« La communauté (ne) devient pernicieuse (que) lorsqu’elle amène à se “séparer” des lois et des principes républicains. »

Baubérot approuve la position du Président qui pointe du doigt la responsabilité de la République dans le phénomène de ghettoïsation de certaines zones du territoire, où se concentrent misère et difficultés. Il critique cependant son laxisme paradoxal, entre le laissez-faire dans l’enseignement des langues et des cultures d’origine, où du personnel enseignant est nommé et payé par des gouvernements étrangers depuis 1977, et le caractère liberticide de certains articles du projet de loi « contre le séparatisme ».

Le conflit entre valeurs et principes est à la racine de la confusion qui anime les débats sur la laïcité et la République. Pour Baubérot, les valeurs sont un concept fourre-tout interprétable d’un gouvernement à l’autre, pour le meilleur ou pour le pire, auquel il faut préférer celui des principes républicains, stable et garant des libertés individuelles.

« L’Église catholique respecte-t-elle les valeurs de la République quand elle interdit l’accès de la prêtrise aux femmes ? Et pourtant, elle n’est pas poursuivie pour discrimination à l’embauche. Et que dire des maçons, dont toutes les loges sont loin d’être mixtes ! »

Baubérot rappelle les propos de Durkheim sur l’intégration, aussi bien nécessaire pour prévenir l’anomie, que dangereuse quand elle est unilatérale, « transformant ses citoyens en membres passifs ».

En écho aux références utilisées dans l’hommage présidentiel à Samuel Paty, l’auteur rappelle la nature des débats de l’époque autour de la Loi de 1905, où Clémenceau clamait que « s’il pouvait y avoir un conflit entre la République et la liberté, c’est la République qui aurait tort ».

« Tant qu’on n’aura pas intégré culturellement que la République est “indivisible” sans être “une” pour autant, alors on courra droit vers la catastrophe et les prophéties autoréalisatrices d’une détérioration de la situation feront florès. »

Pour Baubérot, le projet de loi contre le séparatisme va à l’encontre de la conception laïque libérale d’antan, de l’interdit d’enseignement à domicile qui touche près de 50 000 élèves, à celui du port du foulard dans les services publics, ou encore celui qui prévoit une ingérence de l’État dans l’Islam.

Baubérot craint que cette nouvelle loi ne fasse qu’accentuer un sentiment anti-laïque et crée un terreau favorable à la séparation de certaines communautés. Ces mesures sont défendues dans le cadre de la menace terroriste, il faut veiller à ce qu’elles n’entravent pas durablement les libertés individuelles.


Pour lire l’article, cliquer ICI.

Pour lire la chronique « l’État de droit vaut mieux que la République » de Gaspard Koenig, cliquer ICI.

 

Publié le 16/10/2021.

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