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[Lu Ailleurs] : « Le numérique est l’enjeu géopolitique ultime. » Shoshana Zuboff

[Lu Ailleurs] : « Le numérique est l’enjeu géopolitique ultime. » Shoshana Zuboff

Dans Le Figaro, Shoshana Zuboff appelle à réguler d’urgence le secteur numérique pour que la démocratie survive au « capitalisme de surveillance ».

 

Il y a deux ans, Shoshana Zuboff théorisait dans son livre le « capitalisme de surveillance ». Cette nouvelle forme de pouvoir qui est apparue avec le numérique évolue, selon elle, de manière très inquiétante. À l’origine, l’universitaire avait défini quatre étapes au « coup d’État épistémologique en cours ». Deux ans après, nous sommes déjà entré dans la quatrième phase. Le numérique a évolué, selon elle, vers un « déterminisme économique ».

« Les racines et les bases du système démocratique sont actuellement érodées par un système capable d’influencer ce que nous lisons, ce que nous pensons, ce que nous faisons, et capable au passage de dégrader notre dignité, notre individualité, et de créer une inégalité structurelle des connaissances. »

Quelles sont donc ces quatre étapes du « capitalisme de surveillance » pour Shoshana Zuboff ? La première consiste à transformer la vie privée des individus en matière première gratuite. Les données personnelles des individus sont extraites et collectées à leur insu puis déclarées « propriété privée » par les grandes entreprises du numérique. Le comportement humain est utilisé à des fins de prédictions algorithmiques. La seconde étape est celle de « l’inégalité épistémique ». C’est la différence entre ce que je peux savoir et ce que l’on peut savoir de moi.

« Ces sociétés prennent nos données sans le demander, les données personnelles qu’elles possèdent sont des biens volés. Le sens de mon travail est de contester la base même de leur système qui revendique la propriété sur nos données. »

Une fois ces droits individuels bafoués, la troisième étape est le moment où il n’est plus possible d’échapper au ciblage des algorithmes et à la collecte des données lors des usages en ligne. Toutes les informations extraites du comportement en ligne de l’individu servent désormais à l’orienter dans ses choix. La quatrième et dernière phase est celle du « coup d’État épistémique ». Une ère où « les machines savent, et les systèmes décident, dirigés et soutenus par l’autorité illégitime et le pouvoir antidémocratique d’intérêts privés. » Le numérique prend le pas sur la démocratie au nom d’un progrès inéluctable, selon ces mêmes entreprises, qui font tout pour garder la régulation à distance de leurs activités.

« Nous devons refuser que l’âge numérique permette l’utilisation des données pour des objectifs économiques étriqués, au profit d’un tout petit groupe et aux dépens du plus grand nombre. »

Comment préserver la démocratie de la dystopie annoncée ? À ce stade, Shoshana Zuboff salue le travail de l’Union européenne qui entend mettre au pas les géants du numérique. Le premier recours est de soumettre ces entreprises à un nouveau cadre légal. La règle de droit ne tue pas l’innovation. Au contraire, c’est le monopole de ces entreprises qui tue la concurrence. Shoshana Zuboff recommande de toute urgence que l’on sanctuarise la sphère privée et que l’on protège légalement les données des individus. Et si la patrimonialité des données personnelles était la solution ?


Pour lire l’article « Shoshana Zuboff : « La société démocratique se transforme en autocratie numérique » », cliquer ICI.

Pour consulter notre rapport, « Aux data, citoyens ! », cliquer ICI.

Pour lire la tribune de Maxime Sbaihi « Taxe GAFA : « Le vieux réflexe de la taxe est dépassé, il est même inefficace et naïf. » », cliquer ICI.

Pour lire la chronique de Gaspard Koenig « Quel prix pour notre vie privée ? », cliquer ICI.

 

Publié le 28/06/2021.

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