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Le désordre au service de la démocratie – Gaspard Koenig

Le désordre au service de la démocratie – Gaspard Koenig

Dans Les Échos, Gaspard Koenig explique qu’il souhaite que le Président de la République n’ait pas de majorité à l’issue des élections législatives afin de contrer « l’absolutisme inefficace » conceptualisé par Jean-François Revel. 

 

Quelle mouche aurait donc piqué Gaspard ? Après avoir expliqué voter pour Emmanuel Macron dès le premier tour de l’élection présidentielle, le philosophe et fondateur de GL souhaite cette fois-ci, dans le cadre des élections législatives, que le locataire de l’Élysée ne dispose pas de majorité absolue à l’issue du scrutin. Loin d’être dissonant, le raisonnement de Gaspard s’appuie sur la raison institutionnelle.

En effet, cinq années d’absolutisme macroniste ont poussé à bout la logique hyperprésidentialiste de la Ve République. Le changement de méthode, annoncé par celui qui a rechigné à descendre dans l’arène politique, peine à se dessiner à mesure que les jours passent. Les réformes promises sont renvoyées aux calendes grecques, les cabinets ministériels hument le parfum des sociétés de cour, la délibération est absente des arcanes du pouvoir mais le dévouement des conseillers au prince est total. Si tout semble aller pour le mieux dans le vase clos du pouvoir, rien n’est moins sûr vu d’en bas.

« Aujourd’hui le pouvoir n’a jamais été plus absolu et moins efficace. Peut-on passer encore cinq ans avec une gestion au fil de l’eau ? »

L’idée d’un conseil national de la refondation censé réunir des personnalités aux points de vue divergents pour produire des décisions négociées et consensuelles frôle la caricature institutionnelle tant son rôle s’apparente normalement à celui qui est dévolu aux assemblées parlementaires. C’est justement pour redorer l’Assemblée nationale et sa fonction délibérative que Gaspard souhaite qu’aucune majorité absolue ne se dégage ce dimanche. Un parlement pluraliste non soumis au joug d’une majorité de godillots aurait le mérite d’insuffler du débat dans ce qui devrait être le sanctuaire de notre démocratie.

Une cohabitation peut même conduire à des effets bénéfiques sur l’action publique. Gaspard ré-insiste ici sur ce qu’il n’a pas manqué de rappeler à maintes reprises. Les périodes de cohabitations ont permis au Premier ministre et à son gouvernement d’enclencher des réformes structurelles dont notre pays porte encore les traces. Pour la confrontation d’idées neuves, pour qu’une partie de la population se sente représentée, pour que « les utopistes se confrontent au réel », il apparaît plus que jamais nécessaire de ne pas accorder au Président la majorité qu’il désire.

« En 2021, je plaidais déjà pour une cohabitation dès le début du futur quinquennat, en rappelant que les trois précédentes avaient produit leur lot de transformations radicales. »

S’arroger le monopole de l’ordre et de la raison républicaine après n’avoir recueilli que 11% des suffrages des inscrits est un pari audacieux voire dangereux. Pour Gaspard, la rhétorique gouvernementale n’est pas sans rappeler le Parti de l’Ordre de la IIe République qui n’agissait que dans l’intérêt d’une seule classe, celle des notables, et pensait le pluralisme comme un fléau à abjurer. Faut-il se résoudre à accepter sans sourciller la propension qu’a le pouvoir exécutif à vouloir soumettre le pouvoir législatif ? Pour l’ordre de demain, celui qui replace le Parlement au centre du jeu démocratique, Gaspard vote pour le désordre aujourd’hui.


Pour lire la chronique de Gaspard dans Les Echos, cliquer ICI.

Pour lire notre recueil “Déprésidentialiser la Ve République”, cliquer ICI.

 

Publié le 17/06/2022.

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