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Jupiter parmi les mortels – Gaspard Koenig

Jupiter parmi les mortels – Gaspard Koenig

Dans Les Échos, Gaspard Koenig voit dans le résultat des élections législatives une opportunité pour renouer avec la culture du compromis. Le retour en grâce de la pratique parlementaire nous permettra d’en finir avec le présidentialisme jupitérien. 

 

Depuis dimanche, les commentateurs politiques s’agitent çà et là pour décrypter ce qui, depuis l’instauration du quinquennat et la synchronisation du calendrier électoral, apparaît d’autant plus inédit : l’absence de majorité absolue donnée au Président de la République. Si bon nombre d’éditorialistes fulminent contre ce qu’ils jugent être une France ingouvernable, Gaspard salue au contraire un vent de fraîcheur après la tempête jupitérienne. Tout d’abord, jamais l’Assemblée n’avait semblé aussi représentative de la diversité des opinions politiques de nos concitoyens et cela sans la mise en place d’un scrutin proportionnel. Ensuite, le résultat de dimanche nous donne à voir une diversité sociologique inédite parmi les nouveaux députés. Pour la première fois, une femme de ménage fait son entrée au Palais Bourbon !

Alors que le précédent quinquennat d’Emmanuel Macron avait poussé l’hyperprésidentialisme à son paroxysme tant dans la symbolique que dans la pratique du pouvoir (240 projets de lois gouvernementaux contre 114 propositions de lois parlementaires), le Président et sa majorité relative se retrouvent désormais contraints de passer à la table des négociations. Quoi de plus normal finalement que de voir chacun revenir à son poste. L’exécutif exécutera les lois, le Parlement les discutera et les votera.

“Cette législature pourrait imposer par la pratique ce qui semblait impossible à obtenir par la voie de la réforme constitutionnelle : “Déprésidentialiser la Ve République” comme le réclame Jean Jacques Urvoas, ancien garde des Sceaux, dans le récent rapport de GenerationLibre.”

Néanmoins comme le rappelle Gaspard, “pour que change l’esprit des institutions, il faudra que les acteurs politiques changent d’attitude”. Autrement dit, il est impératif que les députés de l’opposition dont ceux issus de la NUPES adoptent une démarche constructive pour en finir avec une opposition de principe qui s’avère aussi caricaturale sur la forme qu’inefficace sur le fond. De façon similaire, les députés de la majorité doivent rompre avec l’arrogance qui a parfois caractérisé la dernière législature afin de prendre acte de la volonté émise par les Français d’avoir une Assemblée pluraliste.

Ainsi, c’est une nouvelle mécanique institutionnelle qui se doit mettre en place. En l’état, la Première ministre ne peut rester en poste. Le Premier ministre doit être en quelque sorte désigné par l’Assemblée. Le chef de l’État doit d’abord rester dans son pré-carré présidentiel en vertu de la Constitution de 1958 : être le chef des armées et la clé de voute des institutions. De plus, Gaspard félicite ce retour au parlementarisme qui réintroduira in fine du temps long dans les débats, rompant ainsi avec “l’inflation normative dont se désespère le Conseil d’État”.

“Je forme le voeux que cette expérience soit l’occasion de redécouvrir les vertus du parlementarisme que nos voisins européens pratiquent sans drame, et avec elles les vertus humaines du dialogue.”

Si comme le dit Gaspard, l’ancien ministre Alain Peyreffite constatait – dans son ouvrage “La société de confiance” – la préférence culturelle française pour la confrontation violente et stérile, rien n’empêche cette Assemblée d’en sortir. Aujourd’hui, elle dispose d’une occasion unique pour embrasser une nouvelle culture politique, celle du compromis, dans laquelle députés majoritaires et d’oppositions pourraient, à l’appui de négociations, trouver des majorités d’idées sur des textes audacieux.

De la réussite de cette Assemblée pourrait advenir l’une des suggestions phares de notre recueil “Déprésidentialiser la Ve République” : la fin de l’élection du Président de la République au suffrage universel pour renouer avec la pratique d’avant 1962, celle de son élection par un collège de grands électeurs afin d’en finir avec le présidentialisme inefficace.


Pour lire la chronique de Gaspard dans Les Echos, cliquer ICI.

Pour lire notre recueil “Déprésidentialiser la Ve République”, cliquer ICI.

 

Publié le 22/06/2022.

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